jeudi 5 avril 2018

SNCF: Monsieur Macron, il faut parler maintenant !


 Le Journaliste Eric Brunet, dans son Brunetmétrie sur RMC, vient aujourd’hui de tenter de faire porter le chapeau de la grève SNCF à Elisabeth Borne, Ministre des transports, au prétexte qu’elle aurait très mal géré ce dossier  et mis la France sans dessus dessous et tout cela pour introduire, selon lui, une réforme qu’il qualifie de réformette ! C’est aller un peu vite en besogne.

Il est vrai que cette réforme n’est pas bien comprise par les Français, puisqu’elle ne met pas vraiment en cause les avantages actuels des cheminots (Statut inchangé pour le personnel actuel, pas d’impact sur les rémunérations, et pas de privatisation de la société et donc de menace sur l'emploi). On nous dit qu’il faut préparer l’entreprise à affronter la concurrence Européenne mais on ne comprend pas vraiment comment cette réforme va être déterminante pour rendre à court terme la SNCF plus compétitive.

Elisabeth Borne a certes une longue expérience des transports gagnée à la SNCF ou dans le ministère des transports ou elle travaillait il n’y a pas si longtemps avec Ségolène Royale. Au cours de ces fonctions, elle n’a pas elle ne s'est pas vraiment faite remarquée par la promotion de réformes significatives. Mais elle a été choisie par un gouvernement qui estimait  sans doute ne pas devoir se priver de ses compétences.

C’est donc du coté du pouvoir actuel, Emmanuel Macron et Edouard Philippe, qu’il faut rechercher les responsabilités de la crise actuelle. La communication de cette réforme, certainement indispensable de notre société ferroviaire,  a été depuis le début calamiteuse et pourra servir plus tard d’exemple sur ce qu’il ne faut pas faire.

Tout d’abord, elle ne figurait pas dans le programme électoral d’Emmanuel Macron, seul le problème des retraites des cheminots, dont on ne parle pas aujourd’hui, avait été mentionné. Il en découle donc un manque de légitimité. Ensuite le gouvernement n’explique pas sa réforme aux Français, et pire encore il ne l’assume pas vraiment.

Il essaie de la justifier en évoquant la concurrence prévue et en expliquant qu’elle a été décidée par Bruxelles : et pan sur l’Europe ! Ou encore que cette décision a été entérinée par le pouvoir précédent: et pan sur le Parti Socialiste ! Pourquoi ne pas expliquer simplement aux Français de manière responsable que cette décision a été prise par la France, qu’elle est maintenant irrévocable, qu’elle ne peut être l’élément que les syndicats veulent contester et renégocier, et que le pouvoir en place a le devoir de rendre la SNCF compétitive pour éviter son naufrage ultérieur ! 

Pour convaincre l’opinion, le pouvoir en place n’explique pas suffisamment l’équation économique actuelle de notre société nationale en montrant par exemple que les usagers du rail bénéficient de tarifs très préférentiels financés par les contribuables que nous sommes. Au lieu de cela il s’est livré à ce que les militaires appellent une préparation d’artillerie en orchestrant une campagne qui a stigmatisé les cheminots, dans le but de mettre l’opinion publique de son coté.

Grace à cette maladresse, nos cheminots ont beau jeu de montrer aujourd’hui qu’ils ne sont pas les privilégiés que l’on prétend et que leur statut ne peut expliquer seul les déficits actuels de leur société. Il leur est également facile de démontrer qu’ils ne sont pas non plus responsables des retards dans les trains, dus principalement au manque de politique d’entretien du réseau, de leur Direction, pas plus que des déficits provoqués en grande partie par les investissements de la politique menée sur le « tout TGV » ! 

Il reste que le Gouvernement doit aujourd’hui tenir bon, mais s’il veut convaincre les Français, il doit expliquer pourquoi cette réforme est importante ! Il n’a rien à négocier, sinon celle-ci, déjà modeste, n’aurait plus aucun sens. Mais ce sera dur. Sa meilleure chance serait que l’un des syndicats dits « réformateurs » mette les pouces d’ici la fin du mois, avec l’intention cachée de couler son adversaire CGT qui a pris le leadership de ce grand mouvement de grève et prétend aller jusqu’au bout!


On peut comprendre que notre Président de la République souhaite rester en retrait pour voir l’évolution de ce mouvement social. Mais il aurait tort d’attendre que ses fusibles Borne , puis Philippe sautent, car dans l’intérêt du pays, c’est maintenant qu’il doit lui même expliquer et justifier sa réforme aux Français afin d'obtenir leur support et éviter que cette grève ne dégénère comme il y a 50 ans! Il faut beaucoup moins d'eau pour éteindre un incendie qui ne fait que démarrer!